• In Nomine Patris et Fili et Spiritus Sancti - Partie 1

    In Nomine Patris et Fili et Spritus Sancti - Première PartieJe suis né dans une famille catholique pratiquante, du moins ce qu'elle avait de pratiquante lors des grandes fêtes : Epiphanie, Annonciation, Assomption, Toussaint, Noël et naturellement, les Rameaux, Pâques… Il parut évident à mes parents de me faire suivre des cours de catéchisme, en même temps que mes camarades de classe.

    C'est ainsi que je suis devenu "Enfant de Chœur", et oui, ça ne rigolait pas ! Du coup, j'étais devenu le faiseur de messe de la maison : tous les dimanches soir, à l'Eglise St Jacques, où j'assistais, enfin c'est un bien grand mot, le prêtre lors des cérémonies religieuses. J'étais convaincu qu'à chaque fois que je prenais l'hostie, je ne dirai plus de "gros mots" pendant toute une semaine ! Voici une des merveilles de la foi ou peut être de la naïveté ? S'il te plaît, laisse-moi garder ce petit espoir de l'effet placébo du pain du Christ. Tu te doutes bien que ça n'a pas duré. Au bout de deux ans, je me lassais d'être ainsi, assistant, à peine plus officiant que l'Assemblée de fidèles. Et je dois avouer, que c'était une des premières pierres qui m'ont mené sur des sentiers moins fréquentés, du moins en apparence...

    Mais avant cela, tu voudrais peut être une petite anecdote par rapport à mon expérience d’enfant de chœur ? Peu importe, je te la raconte quand même. 

    In Nomine Patris et Fili et Spritus Sancti - Première Partie

    C’est le 24 décembre, messe de minuit. L’église St Jacques est pleine à craquer, tous les paroissiens sont là, des familles d’inconnus, d’amis, et la mienne. J’ai bien repéré où s’installaient mes parents, histoire de leur faire un petit coucou. In Nomine Patris et Fili et Spritus Sancti - Première PartieAvec mes copains, nous sommes dans la sacristie, tous en tenues, des aubes bien blanches, ajustées, les cheveux gominés… le prêtre nous appelle, il est l’heure d’allumer les cierges et de placer les grains d’encens sur le charbon. Les volutes épaisses à l’odeur entêtante s’élèvent dans la pièce. Très rapidement, la sacristie se transforme en Londres dans le brouillard, tant la fumée est épaisse. Il est temps de se lancer dans les bas-côtés, le long des travées, descendant l’église pour arriver jusqu’à l’antéglise. Nous sommes alors sur l’allée centrale, conduisant à l’autel. Deux par deux, cierges portés bien haut, nous avancions à travers la nef centrale sur les sons de l’orgue et les voix de l’Assemblée, l’encens émanant de l’encensoir doré qui se balançait au bout de sa chaîne, faisant extraordinairement répandre son parfum dans toute l’église pourtant immense. Je monte les marches, une à une, et chacun emprunte le déambulatoire pour prendre sa position autour de l’autel.

    La cérémonie se déroule tranquillement. Le prêtre quitte l'arrière de l'autel et se dirige vers un grand fauteuil, à l’avant du chœur, ressemblant à un trône. Nous sommes deux à l’accompagner. Nous quittons nos places près du déambulatoire, nous nous approchons et nous nous asseyons à ses côtés, tels de valeureux chevaliers. Je me trouve à sa gauche pendant qu’il lit un texte qui me paraît, étrangement, bien fumeux… mes yeux semblent ne pas vouloir tourner à la même vitesse que ma tête, ou du moins, c’est l’impression que j’en ai.  Mais que se passe-t-il ? J’ai de plus en plus chaud. La lecture est terminée, il faut se lever, ho laaaa, ça tangue. Heureusement, mon siège près du déambulatoire n’est qu’à trois mètres derrière moi, sur ma gauche. Allez, je vais y arriver. Mes pieds sont lourds mais une fois lancés, ils partent tous seuls, pour m’amener directement où il faut et où je m’avachis. Je me sens de plus en plus mal. Je ne suis pas le seul à l’avoir remarqué. Mes copains enfants de chœur aussi et, mes parents ! À l’autre bout du chœur, un copain me fait signe, demandant ce qui m’arrive. Alors là, J’en suis arrivé au point où il faut que j’agisse, mais quoi et comment ? Des centaines et centaines de regards sont tournés dans ma direction, quelle honte et puis, est-ce que ça n’est pas un pêché de quitter une messe ? Je me balance de plus en plus, ce n’est vraiment pas bon signe…  Go !  je prends mon courage à deux mains, alors que tout le monde est assis, je me lève, d’un coup, et le plus rapidement et discrètement possible (imagine toi traverser une scène de théâtre, pendant une représentation, alors que tout le monde regarde dans ta direction… à ton avis, ça se voit ?) je traverse le chœur pour arriver dans la sacristie. Je pousse la porte, m’approche de la chaise et, pas le temps de m’y assoir, je m’effondre brutalement, m’étalant de tout mon long sur le carrelage froid. Et voilà comment ma carrière s’est arrêtée, avec une odeur d’encens trop forte pour moi, en m’évanouissant en pleine messe de minuit. Tout bien réfléchit, ça a été la dernière fois que j’ai assisté à cette cérémonie là !


    In Nomine Patris et Fili et Spritus Sancti - Première PartieAvec le recul, j’y verrais presque la chute de l’ange déchu. Mais si, tu la connais l’histoire moralisée et diabolisée : l’ex-ange, Lucifer. Soit disant, il se serait rebellé contre Dieu. Une fois sa révolte stoppée par les Archanges et autres anges, Dieu aurait déchu du rang angélique Lucifer et ses comparses, devenant ainsi les anges déchus. L’autre version, à laquelle j’adhère, est que Lucifer aurait été envoyé sur Terre par Dieu lui-même, pour tester la valeur de l’Homme. Mais comment une religion pourrait-elle louer et glorifier un Dieu manipulateur, trompeur et extrémiste ? Il fallait pour ça un bouc émissaire, le Porteur de Lumière (lux fero, Lucifer). Enfin bon, me comparer à Lucifer n’est-il pas un soupçon prétentieux ? Et puis, plutôt réducteur d’assimiler Dieu à de l’encens… Allez, trêve de plaisanterie, où en étais-je… ?


    Sautons les années collège pour en arriver au lycée. Je me suis inscrit à l’Aumônerie et là, Dieu que ça a fait du bien. Au catéchisme, ce n’est ni plus ni moins que l’école : tu te tais, tu écoutes, tu réponds aux questions que l’on te pose et c’est tout… Après les moutons de Panurge, voici les agneaux de Dieu : les enfants catholiques qui suivent bêtement et à qui l’on n’essaie même pas développer la réflexion personnelle. J’avoue je suis dur, parce que, comment demander ça à des enfants de moins de douze ans ? Mais en même temps, si l’on n’essaie pas c’est certain qu’ils ne pourront pas le faire. Tu en penses quoi toi ? Ne devrait-on pas stimuler les enfants dès leur plus jeune âge à la réflexion « philosophique » en abordant avec des concepts et des mots simples ?

    Quoiqu’il en soit, c’était totalement l’inverse au lycée où là, nos soirées « religieuses » étaient organisées sous forme de groupes de discussion sur l’actualité en faisant le lien avec la religion et développant ainsi la prise de la parole, l’écoute et, cette fameuse réflexion… elle qui m’a amené ici, avec toi.

    "Mais où est-ce que tu veux en venir ?  Qu’y a-t-il d’occulte à aller à l’église, suivre des cours de catéchisme ou allez débattre à l’aumônerie ? Ça n’en reste pas moins des « culs bénis », des anti-ésotérisme, qui jadis brûlaient les sorcières et encore aujourd’hui, ne font pas vraiment preuve d’une grande ouverture d’esprit !"

    Et bien c’est un peu là où tu te trompes… un peu parce qu’il y a tout de même une part de vérité dans ton discours, mais voilà bien une leçon à tirer : dans toute chose il y a vérités et fausses croyances, en aucun cas il n’y a vérité absolue ou erreur totale.

    Et puis, n’oublie pas qu’en chaque chose qui est, l’occulte y est !

    Mais je dois t’être sincère, ce n’est pas par besoin de culture ou par curiosité que je me suis vraiment lancé dans la recherche de l’ésotérisme et plus particulièrement la sorcellerie. Et non, je n’ai pas une démarche du « mais pourquoi donc ma religion rejette-elle certains cultes ? ». In Nomine Patris et Fili et Spritus Sancti - Première PartieComme tout ado j’ai eu une bonne crise avec l’autorité parentale, besoin de forger ma personnalité, mon identité, souvent au mépris des autres. Mon goût pour le fantastique, les bases religieuses et la guerre avec mes parents et envers moi-même ont été un cumul d’éléments qui m’ont fait aller sur internet pour rechercher quelques données, qui à l’époque, me paraissaient être la solution, personnalité, différenciation, force, supériorité… voilà ce que je cherchais, je fantasmais sur une vie que je n’avais pas, des désirs inavoués… je convoitais tout, tout ce que je n’avais pas, tout ce qui aurait pu me rendre plus beau, plus fort, plus intéressant.

    Là, je dois faire attention à ce que je te raconte, parce que j’arrive à une croisée des chemins. Contrairement à un film où il y a une bande, une histoire, ma vie occulte ne s’est pas déroulée uniformément et à sens unique. Il faudrait voir mon avancement dans la vie comme le ressac des vagues, ça va, ça vient, ça monte, ça redescend…Mais peut être pourrais-je m’arrêter là, et laisser quelques temps avant de poursuivre ? Allez, avant d’en arriver à mon dark side, je vais poursuivre mon histoire d’église, d’aumônerie et quel lien j’ai fait avec le paganisme.