• In Nomine Patris et Fili et Spiritus Sancti - Partie 3

    Il me fallu plusieurs semaines pour m’habituer à ce nouveau cadre, à cette discipline de fer, à ces journées de cours de sept heures dont cinq en continu. Comme chaque weekend, il y avait des sorties organisées. Cette fois-ci, c’était à Lausanne. In Nomine Patris et Fili et Spiritus Sancti - Partie 3Ça faisait déjà deux mois que j’étais en Suisse et je n’avais jamais quitté les environs de l’école. Je m’inscrivais dès le mercredi soir, après avoir dîné, accompagné d’un ami du dortoir, Olivier. Il me disait que Lausanne était une ville assez sympa, mais bon, il ne fallait pas que je compte m’éclater comme à Paris ou Londres, ici, c’est bien plus « strict ». J’attendais quand même avec impatience le samedi matin, pouvoir sortir de l’école, dans une ville francophone, ça me ferait le plus grand bien, marre de voir des sorties sur des villes germanophones, je ne comprenais rien à l’allemand. Le « jour j » arriva à toute vitesse. Nous étions en « civil », et hop, tout le monde dans les cars de l’école, direction Lausanne !  Une bonne demi-heure plus tard, nous arrivions en centre ville. Les fauves allaient être lâchés, mais pas sans avoir reçu les consignes et les horaires pour rentrer à l’école. Tout le monde partait dans tous les sens, en petits groupes. Je décidais de faire bande à part, une fois n’est pas coutume, et de In Nomine Patris et Fili et Spiritus Sancti - Partie 3découvrir en free style cette ville. Je trouvais que c’était tout à fait dans l’esprit de Paris, avec ces grandes cathédrales, toutes ces pierres, mais en plus propre ! Sans nul doute, les suisses sont champions de ce côté-là, la France pourrait prendre exemple. La journée se déroulait tranquillement, je regardais quelques boutiques, je déjeunais aux abords d’un parc, puis je continuais ma balade dans des grandes boutiques, je m’arrêtais prendre une viennoiserie à une boulangerie, tout en continuant ma promenade. Je remarquais un passage étroit où il ne devait pas y avoir la place pour plus d’une personne à pied et un vélo à côté. Ce passage était entre deux bâtisses. Il semblait mener à une autre grande artère de la ville. Malgré le charme de cette ruelle, il faisait bien sombre… certainement pas un endroit où traîner le soir. En y pénétrant, j’aperçus une toute petite vitrine, et, à ma grande surprise et surtout ma plus grande joie, je constatais qu’il s’agissait d’une librairie ésotérique. Boule de cristal, runes, dagues, encens, cristaux… tout y était. Personne à droite, personne à gauche, ni une ni deux je poussais la porte de la boutique. Un petit carillon de fer et de cristal de roche retentit légèrement. La commerçante était installée derrière son comptoir, en train de feuilleter un livre. Nous nous saluons de la tête. C’était la première fois que j’osais entrer dans une telle boutique. J’éprouvais une certaine honte de le faire. Être pointé du doigt comme « sorcier » et s’attirer les moqueries des autres, je m’en passais très bien !

    In Nomine Patris et Fili et Spiritus Sancti - Partie 3Ça sentait tellement bon, elle devait faire brûler de l’encens… Le magasin était tout petit, tout au plus 40m². On s’y sentait tellement bien, comme chez soi. Un tabouret était dans un coin, près d’une pile de livre. Mes yeux devaient scintiller devant tant de produits « magiques ». Je parcourais la haute bibliothèque quand tout à coup, j’entendis un bruit lourd. « Merde, j’ai fait tomber quelque chose ». Il s’agissait d’un petit livre en cuir, de couleur marron foncé. Le cuir était abîmé, les feuilles en parchemin avaient bruni. Aucune inscription sur la couverture, aucun titre à l’intérieur, il commençait juste par « à toi qui me tiens entre tes mains, tu deviens l’hérité sans nom. Mais sache que si tu poursuis en ma demeure, à jamais tu y resteras, invisible de tous. »

    « Mais bien sûr… genre, je vais me faire kidnapper par un livre » Sérieux, depuis quand un livre, même si c’était un vieux grimoire machin chose, aurait le pouvoir de m’aspirer ?? Je gloussais dans mon coin tout en cherchant, quand même, un prix. Je ne voyais pas d’étiquette, rien d’écrit au crayon sur une des premières pages. Je le gardais à la main au cas où son prix serait intéressant, tout en continuant à faire le tour des différents objets qu’il y avait à vendre. Au bout de quelques minutes, je me dirigeais vers la commerçante, lui tendais le livre ramassé par terre et lui demandais le prix. Elle paraissait étonnée que je lui tende. Elle le posait sur le comptoir et me souriait.

     « Comment avez-vous eu ce livre ? »

     « Bin, dans votre boutique ! Apriori je l’ai fait tomber en passant devant, je l’ai ramassé et voilà… » C’est quoi cette question ?

     « Vous l’avez ouvert ? Vous avez lu quelque chose ? »

     « J’ai feuilleté les premières pages pour voir s’il y avait un titre, mais à part une petite mise en garde qui m’a fait rire, je n’ai pas plus lu que ça, pourquoi ? »

     « Comme ça, il était bien caché, ça m’étonne que vous l’ayez trouvé comme ça. »

     

    La femme engageait la conversation sur l’ésotérisme, sur ce qui j’y connaissais, comment j’avais découvert leur boutique. Je passais toute l’après-midi avec elle. Nous buvions du thé, elle me donnait des conseils sur certains produits, sur des groupes de pratiques. Vraiment, une dame très sympathique. Je n’ai pas vue l’heure passer… Si je ne partais pas immédiatement j’allais être en retard.

     « Excusez moi madame, mais je vais être obligé de vous quitter. Je dois retourner à mon car avant qu’il ne parte…»

     « Je ne t’ai même demandé d’où tu venais, car tu es français, n’est-ce pas ? »

     « Tout à fait. Je suis lycéen à l’école St Martin, à quelques kilomètre d’ici »

     « Je connais bien. C’est amusant »

     « Quoi donc ? »

     « Je n’ai pas l’habitude d’avoir comme clients des élèves de cette école. Certains sont attirés par l’ésotérisme, mais ils vont dans des boutiques plus… commerciales et moins artisanales que la mienne. »

     « C’est bien dommage, je suis certain qu’ils y perdent quelque chose. »

     « Et moi donc ! »

     La femme se mettait à rire à plein poumons.

     « Je vous dois combien pour le livre alors ? »

    In Nomine Patris et Fili et Spiritus Sancti - Partie 3« Ce n’est pas un livre, c’est un grimoire. Son dernier propriétaire s’appelait Charles Danvers. Un très grand initié. Il est mort en 1781. Laisse-moi te remercier pour cet après-midi en t’offrant ce petit grimoire »

    « Oh mais… je ne sais pas... je ne sais pas quoi vous dire ! »

    « Rien, file, tu vas  rater ton car »

    « Merci encore madame… au revoir »

    « Oui… au revoir… »

    Elle riait à nouveau… franchement, bizarre ces suisses, mais très sympas !


    Sur le chemin du retour, je n’ai pas décroché un mot. Je me remémorais cette journée très agréable, et surtout, ce moment magique avec la dame de la boutique ésotérique. Je pris le risque d’en parler à mon pote de chambrée, Olivier, qui ne se moqua pas de moi, au contraire…

    « Oh, c’est dommage que tu ne m’ais pas dit que tu t’intéresses à ça. Je connais une super boutique ici, super spacieuse et magnifiquement décorée. Ça m’attire aussi, mais je ne pratique pas du tout, ça me fait quand même un peu flipper… »

     Je restais très étonné par cet aveu. Sur tout le chemin du retour, nous ne cessions de parlé d’ésotérisme, de magie, de fantôme. Je lui montrais mon livre.

     « Heureusement qu’elle ne t’a pas fait payer pour ça… vraiment miteux »

     « Oh c’est bon… Apriori ça à appartenu à un gars au XVIIIème siècle ! »

     

    Vraiment, cette journée était géniale… j’ai découvert une boutique, on m’a offert un livre, et mon pote était en train de devenir un véritable ami !